Botulisme

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Le botulisme est une maladie due aux toxines botuliniques produites par les spores de Clostridium botulinum, bacille gram positif anaérobie ubiquitaire dans les sols et les eaux. Elle est exceptionnelle.

Modes de transmission

  • Cas le plus fréquent : ingestion d'un aliment contaminé (tous les aliments peuvent être impliqués, facteur favorisant : préparations artisanales, absence de conservateurs, conservation dans des conditions d'anaérobiose, conserves avariées) contenant les spores du bacille ou sa toxine. Fréquemment dans le contexte de toxi-infections collectives.
  • Contamination d'une plaie par les spores ou injection intra-veineuses (toxicomanes)
  • Ingestion directe de spores (plus fréquent chez les enfants)
  • Botulisme iatrogène

Il existe 7 types de toxines (A à G) de caractéristiques sérologiques différentes, détruites par l'exposition durant 10 minutes à une température de 100°C ou durant 30 minutes à 80°C. Les spores peuvent quant à elles résister plusieurs heures à 100°C.

Clinique

Botulisme alimentaire

Les signes généraux sont habituellement absents (pas de fièvre, de dégradation de l'état général, de trouble de la conscience) hors pathologies intercurrentes.

  • Incubation de quelques heures à quelques jours (une durée plus courte péjore le pronostic).
  • Phase d'invasion (24 à 48 heures) :
    • Signes digestifs (> 33% des cas) aspécifiques : nausées, vomissements +- diarrhée et/ ou douleurs abdominales = "gastro-entérite non fébrile"
    • Signes ophtalmologiques : paralysie de l'accommodation (presbytie aiguë)
    • Signes neurologiques : dysphagie ++
  • Phase d'état (> 48 heures) – signes ophtalmologiques et neurologiques :
    • Paralysie de l'accommodation (presbytie aiguë)
    • Troubles de l'oculomotricité intrinsèque : mydriase aréactive, ++ bilatérale
    • Troubles de l'oculomotricité extrinsèque : diplopie par paralysie du nerf III, IV et/ ou VI +- nystagmus
    • Tableau de paralysie descendante bilatérale et symétrique : atteinte des paires crâniennes avec tableau bulbaire : dysphagie, dysarthrie et dysphonie → "faiblesse", parésie des membres bilatérale prédominant aux membres inférieurs → parésie des muscles respiratoires avec risque de défaillance respiratoire aiguë. Le principal diagnostic différentiel étant un syndrome de Guillain-Barré.
    • Signes dysautonomiques : xérostomie, xérophtalmie, constipation, dysurie et rétention urinaire, hypotension artérielle orthostatique, arythmies (++ tachycardie sinusale) avec risque d'arrêt cardio-respiratoire

Complications : ++ infections intercurrentes favorisées par le tarissement des sécrétions et les fausses déglutitions (conjonctivites, stomatites, pharyngites, parotidites, broncho-inhalations,…) + iatrogènes.

L'évolution est généralement favorable, la mortalité est cependant de 5 à 10% (++ sur troubles cardio-respiratoires, pathologies iatrogènes et nosocomiales).

Botulisme infantile

Concerne principalement les enfants de moins de 6 mois sur colonisation digestive par C. botulinum → signes digestifs (++ constipation, anorexie) → léthargie, faiblesse, incapacité à téter, atonie +- paralysie des nerfs crâniens. Le diagnostic est particulièrement difficile à évoquer dans cette classe d'âge.

Botulisme d'inoculation

Résulte de l'infection d'une plaie par C. Botulinum sur trauma ou drogues IV. Tableau similaire au botulisme alimentaire sans signe digestif.

D'exceptionnels cas iatrogènes (injection de toxines botuliniques) sont décris, de clinique généralement modérée et spontanément régressive.

Diagnostic

Le diagnostic est essentiellement clinique → difficile au vu de sa rareté et de son expression clinique précoce peu spécifique, fréquemment posé tardivement voire rétrospectivement. Il est à suspecter devant un tableau digestif suivi de troubles ophtalmologiques et/ ou neurologiques en l'absence de fièvre et de syndrome inflammatoire.

  • Biologie courante, électro-encéphalogramme, ponction lombaire, CT-scanner cérébral → normaux (en particulier, pas de syndrome inflammatoire) → intérêt seulement pour éliminer des diagnostics différentiels
  • Vitesses de conduction et électro-myographie → anomalies inconstantes et tardives évoquant un blocage de la jonction neuromusculaire. Intérêt rétrospectif.
  • Analyses microbiologiques du sang, des vomissements, des selles et des aliments suspects → la mise en évidence de la toxine et / ou de la bactérie affirme le diagnostic mais est inconstante.

Diagnostic différentiel

  • Gastro-entérites (pas de signe neurologique ou ophtalmologique, présence d'un syndrome inflammatoire et de fièvre ou d'un état sub-fébrile) pour les formes précoces
  • Crise myasthénique (pas de signe digestif, pas de signe dysautonomique, évolution chronique)
  • Lambert-Eaton (évolution insidieuse)
  • Polyradiculonévrites aiguës de type Guillain-Barré (atteintes neurologiques généralement ascendantes)
  • Syndrome de Miller-Fisher (présence d'une ataxie et d'une aréflexie)

Prise en charge thérapeutique - Traitements

Déclaration obligatoire. Contacter toute personne ayant partagé un repas suspect.

Critère des formes graves nécessitant une admission en soins intensifs :

  • Troubles respiratoires
  • Troubles de la déglutition
  • Arythmies

Traitement symptomatique - supportif :

  • Syndrome sec → aérosols, brumisateurs, larmes artificielles
  • Dysphagie → sonde naso-gastrique
  • Signes de défaillance respiratoire → intubation et ventilation mécanique
  • Discuter (pas d'EBM) 3,4-diaminopyridine 5-15 mg 3-4x/ jour PO ou chlorhydrate de guanidine 10-35 mg/ kg/ jour PO

Traitement étiologique – pas d'EBM → à discuter pour les formes graves – sérothérapie entérale ? sérothérapie IV ? antibiothérapie IV (pénicilline G 3 M U 6x/ jour IV – ou si allergie aux penicillines : métronidazole 500 mg 3x/ jour IV – seul intérêt démontré = formes sur infection d'une plaie) ?

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD