Cadre légal de la déontologie médicale

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  Auteur(s) : Dr Shanan Khairi
  Date de dernière édition : 22/09/2024

La déontologie est un ensemble de devoirs s'attachant à une activité. Elle est codifiée pour de multiples professions (médecins, avocats, prêtres, juges,...) et est intrinsèquement liée à l'éthique, donc à des considérations philosophiques personnelles et collectives. L'article ci-dessous n'a pas d'autre objet que de décrire de façon concise le cadre fixé en la matière par la loi en Belgique. Les lois concernant l'exercice de la pratique médicale sont abordées dans un autre article.

La législation belge est consultable en ligne.

Le cadre légal de l'art de guérir

Il est fixé par les Arrêtés royaux (A.R.) 78 (exercice de l'art de guérir au sens large, y compris les professions para-médicales) et 79 (relatif à l'ordre des médecins), ainsi que par quelques articles du code pénal et lois spécifiques ou non, concernant de près ou de loin la médecine (faux certificats, IVG, non-assistance à personne en danger, secret professionnel, prélèvement et transplantation d'organes, euthanasie, droits du patient, expérimentation sur la personne humaine, recherche in vitro sur embryons,…).

Qu'est-ce qui différencie légalement l'acte médical de coups et blessures (= fondements de l'immunité du médecin) ?

  • la nécessité (diagnostique, préventive, curative)
  • le diplôme et l'agrément aux autres conditions d'exercice de la médecine
  • le consentement libre et éclairé du patient
  • la conformité aux données scientifiques et aux usages
  • l'absence d'intention criminelle
  • le critère de proportionnalité

La loi impose une obligation de moyens, non de résultats (exceptions: chirurgie esthétique, prothèses dentaires). Cependant, suite aux procédures civiles de plus en plus fréquentes visant à obtenir des dédommagements pour fautes médicales, on assiste à une augmentation du prix des soins et à une modification des pratiques (tendance à ne plus chercher avant tout le bien du patient mais à ce qu’on ne puisse rien nous reprocher, quitte à avoir un impact négatif en termes de santé publique. Ex : augmentation du nombre de césariennes pour "raisons médicales"). La socialisation du risque médical est en perpétuelle évolution (création d'un fonds collectif pour les dommages éventuels issus de pratiques médicales, ces dommages étant sans délai et sans devoir prouver la faute mais forfaitaires). Actuellement la loi générale sur la responsabilité civile peut s'appliquer aux médecins si 3 conditions sont réunies :

  • un dommage est démontré
  • une faute est démontrée
  • le lien entre la faute et le dommage est démontré

Une couverture en responsabilité civile n'est pas obligatoire.

L'Arrêté Royal 78

Fixe des conditions d'exercice, protégeant l'accès à la profession médicale :

  • diplôme de docteur en médecine de l'UE
  • visa de la commission médicale provinciale
  • inscription à l'ordre des médecins

Fixe la manière d'exercer :

  • pas de limitation légale aux moyens diagnostiques ou thérapeutiques
  • pas de cumul entre médecine et pharmacie
  • obligation de continuité des soins et d'un système de garde
  • obligation de transmettre le dossier médical à tout médecin choisit par le patient
  • droit à des honoraires, propriété du médecin
  • interdiction d'être prête-nom
  • interdiction de publicité (médecine = hors-commerce)
  • interdiction de lier le montant des honoraires à l’efficacité du traitement

Définit les Commissions Médicales Provinciales (CMP) :

10 CMP composées de 4 médecins (dont le président et le vice-président), 2 dentistes, 2 pharmaciens, 2 vétérinaires, 2 accoucheuses, 2 infirmières, 1 paramédical et 1 fonctionnaire du ministère de la santé. Equivaut à un lieu de rencontre entre les différents acteurs de la santé de la province.

Leurs missions:

  • générales :
    • proposer des mesures de santé publique
    • collaborer à la lutte contre les maladies transmissibles ou quanrantainaires
  • spéciales :
    • vérifier et viser les titres des médecins, pharmaciens, vétérinaires, infirmières,…
    • retirer ou subordonner le visa en raison d'avis d'experts pour raisons psychologiques ou physiques
    • veiller à l'application des lois dans ces professions
    • dénoncer les exercices illégaux
    • informer et veiller aux systèmes de garde

Définit également :

  • l'exercice de l'art dentaire, de la kinésithérapie, de l'art infirmier, des professions paramédicales
  • ces pratiques sont donc également des professions protégées

L'Arrêté Royal 79

Régit la création de l'ordre des médecins:

  • constitué de :
    • 10 conseils provinciaux : nombre de membres effectifs et suppléants fixé par le Roi, mandats de 6 ans renouvelables par moitié tous les 3 ans, élus par les membres non suspendus, vote obligatoire, un assesseur juridique nommé par le roi, voix consultative du membre du CN élu par le CP, élit son président, vice-président et secrétaire [= bureau]
    • 2 conseils d'appels : néerlandophone et francophone, 5 médecins élus par les conseils provinciaux + suppléants, mandats de 6 ans rééligibles + 5 membres conseillers à la cour d'appel nommés par le roi, un greffier, vote obligatoire, président et rapporteurs nommés par le roi
    • d'un conseil national : 1 chambre FR et 1 NL, 10 médecins élus par les conseils provinciaux, mandats de 6 ans renouvelables 1 fois, 6 médecins nommés par le roi sur présentation des facultés de médecine + suppléants, 1 greffier docteur en droit nommé par le roi, 1 président magistrat de la cour de cassation, 1 vice-président par chambre élu par les membres, président + vices-présidents+ juriste = bureau
  • personnalité civile de droit public
  • comprend tous les médecins inscrit au tableau de l'ordre de la province où ils exercent (inscription à un seul tableau) 

Missions des Conseils provinciaux :

  • Dresser le tableau des médecins
  • Veiller au respect de la déontologie, réprimer les fautes professionnelles ou non
  • Donner aux membres des avis sur des problèmes non prévus dans le code de déontologie
  • Signaler les cas d'exercice illégal
  • Arbitrer les contestations d'honoraires
  • Répondre aux demandes d'avis des tribunaux concernant les contestations d'honoraires
  • Fixer la cotisation

Missions des Conseils d'appel :

  • Juger en appel des décisions disciplinaires des conseils provinciaux :
    • Appel par le médecin sanctionné, le magistrat assesseur du conseil provincial ou le (vice)-président du conseil national
    • L'appel est suspensif
    • Seul recours supplémentaire : Cour de Cassation

Mission du Conseil National :

  • Élaborer et adapter le code de déontologie médicale (principes et règles de moralité, d'honneur, de discrétion et de dévouement nécessaire à la profession)
  • répertorier les sanctions disciplinaires
  • donner des avis à la demande des autorités, groupements professionnels, conseils provinciaux
  • fixer la cotisation
  • avoir des relations avec les ordres des autres pays
  • prendre toutes les mesures nécessaire à la réalisation de l'objet de l'ordre

Les sanctions disciplinaires du conseil de l'ordre:

  • avertissement
  • réprimande
  • suspension (2 ans maximum)
  • radiation

Les dentistes

L'art dentaire recouvre toute intervention pratiquée dans la bouche ayant pour but de préserver, guérir, redresser ou remplacer l’organe dentaire. Conditions d’exercice : diplôme légal, visa de la CMP. Il n’y a pas d’ordre. Les règles sont globalement les mêmes que pour les médecins, sauf que pour eux l’obligation de moyens et de résultats est habituelle.

Les kinésithérapeutes

Conditions d’exercice : diplôme légal et visa de la CMP. Il ne peut exercer que sur prescription médicale spécifiant le nombre maximal de séances. Doit fournir à la demaande du médecin prescripteur un rapport sur la réalisation traitement et les résultats obtenus. Il n’y a pas d’ordre des kinésithérapeutes, mais un Conseil National institué auprès du ministère de la SP pour donner des avis.

Les infirmiers

Conditions d’exercice : diplôme, visa de la CMP. Pas d’ordre mais il existe un Conseil National institué auprès du ministère de la SP pour donner des avis. L’AR de 1990 définit les actes pouvant être réaliser par les infirmiers sans prescription médicale ou sur prescription médicale.

Autres professions para-médicales

Ergothérapeuthes, logopèdes,…

Ce sont également des professions protégées (diplôme et visa de la CMP). Pas d’ordre mais un conseil national institué auprès du ministère de la santé publique pour donner des avis.