Hyperhidrose - hypersudation

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  Auteur(s) : Dr Shanan Khairi
  Date de dernière édition : 22/09/2024

L'hyperhidrose ou hypersudation correspond à l'exagération du processus de sudation ("transpiration") au-delà de la thermo-régulation physiologique. Isolée, elle ne relève qu'exceptionnellement de l'urgence. En dehors des hypersudations généralisées liées aux accès fébriles, les hyperhidroses localisées sous dépendance émotionnelle sont les plus fréquentes.

Orientation diagnostique

Hyperhidrose

Démarche anamnestique devant une hyperhidrose :

  • Localisée ou généralisée ? Diurne ou nocturne ? Fréquence ? Durée ? Eléments déclencheurs ?
  • Isolée ou présence de symptômes associés ?
    • Contexte infectieux, fièvre, hypothermie, malaises (céphalées, tachycardie, flushs), douleurs, troubles digestifs, état général dégradé, perte de poids, contexte neurologique, antécédents (sympathectomie ?), médicaments, toxiques, anhidrose localisée associée,… ?

Hyperhidroses localisées

Hyperhidrose émotionnelle

La plus fréquente (expérimentée par ~1% de la population). Sites préférentiels : paumes > plantes > aisselles. Sudation généralement non odorante (hyperactivité eccrine et non apocrine). Début ++ dans l'enfance ou l'adolescence. Histoire familiale dans 33%. De physiopathologie mal connue (zone hypothalamique distincte de celles contrôlant le reste du corps et sous contrôle cortical plutôt que thermosensitif ?), elle reste un diagnostic d'exclusion. Association fréquente à la dyshidrose (vésicules aux paumes et plantes, ++ sur les bords latéraux des doigts).

Hyperhidrose paroxystique sur tumeur intra-thoracique

Résulte d'un contact entre une masse (néoplasies, tumeurs bénignes, côte cervicale,…) thoracique et le tronc sympathique ou les fibres post-ganglionnaires → hyperhidrose généralement :

  • limitée à la partie homolatérale du thorax antérieur, de l'hémiface, du cou
  • spontanée, profuse, sans lien avec des facteurs extérieurs (alimentation, climat, miction, digestion, sommeil, exercice)
  • associée à des signes généraux en cas de néoplasie (douleur, dyspnée, dégradation de létat général, perte de poids, adénopathies, hypoesthésie, parésie faciale, Claude-Bernard-Horner)

Hyperhidroses localisées associées à des dermatites

Granulosis rubra nasi

Rare, débute dans l'enfance (parfois dès 6 mois). Le premier symptôme consiste généralement en une hyperhidrose médio-faciale pouvant précéder de plusieurs années les autres symptômes : érythème nasal pouvant s'étendre aux lèvres, au menton et aux joues +- macules et/ ou vésicules. L'association avec une cyanose froide et hyperhidrose des extrémités est fréquente. La physiopathologie est inconnue mais l'affection régresse généralement à la puberté, pouvant laisser de petits kystes ou télangiectasies.

Autres

Très rarement observée sur ou autour de diverses lésions : naevus, tumeurs glomiques, hamartome eccrine, pachydermopériostose, myxœdème prétibial,…

Hyperhidroses localisées idiopathiques

Zone ne dépassant pas 10 x 10 cm², ++ au niveau du visage ou des bras. Sudations profuses débutant brutalement, parfois déclenchées par la chaleur, durant de 15 minutes à 1 heure, typiquement sans aucun autre symptôme ni signe associé. Mécanisme inconnu.

Divers

  • Hyperhidrose gustative = symétrique autour des lèvres, du nez ou sur le front après la consommation d'épices. S'accompagne souvent de salivation, de sécrétions lacrymales et nasales, de flush. Lorsqu'elle est unilatérale, elle peut révéler une lésion parotidienne (parotidite, abcès, syndrome auriculo-temporal)
  • Hyperhidrose lacrymale = sudation continue et profuse de la région sus-orbitaire, complète un Claude-Bernard-Horner
  • Syndrome d'Arlequin = hyperhidrose faciale avec flushs homolatéraux et anhidrose controlatérale, mécanisme compensatoire

Hyperhidroses généralisées ou étendues

Sont rarement le seul motif de la consultation, les autres symptômes permettant d'orienter le diagnostic.

Thermorégulation des accès fébriles

Généralement évident. Cependant, certains épisodes ne sont pas toujours contemporains des accès fébriles, notamment au cours de la tuberculose, de la brucellose, de l'endocardite d'Osler ou chez les alcooliques et les obèses.

Pathologies systémiques

La triade hypersudation paroxystique + tachycardie + céphalées pulsatiles contemporaines de poussées tensionnelles suggère fortement le diagnostic de phéochromocytome → dosage des catécholamines urinaires. La triade sueurs nocturnes + perte de poids + fièvre doit faire suspecter une maladie de Hodgkin.

Causes occasionnelles de sueurs nocturnes isolées : lymphomes, vasculites, acromégalie

Selon la clinique et les antécédents, on pourra également évoquer : hyperthyroïdie, insuffisance cardiaque congestive, angor, dumping syndrome, tumeurs carcinoïdes, ménopause, grossesse, hypoglycémies, diabète,...

Médicaments et toxiques

Opiacés, anti-inflammatoires non stéroïdiens (naproxène), sympathicomimétiques (terbutaline, ritodrine), antidépresseurs (imipraniques, fluoxétine [jusqu'à 20% des patients traités !]), interférons, dérivés de la vitamine A (acitrétine, isotrétinoïne), bromocriptine, clomifène, anticorps monoclonaux, intoxication ou sevrage alcoolique/ autres toxicomanies.

Etiologies neurologiques

  • Lésions cérébrales : toute lésion hypothalamique (accident vasculaire cérébral, tumeur, chirurgie,…) peut entraîner une hyperhidrose et hyperthermie.
    • Syndrome de Hines = hypothermie épisodique avec hyperhidrose chez le sujet jeune +- agénésie du corps calleux
  • Lésions de la moelle épinière :
    • Hyperréflexie autonome chez les paraplégiques ayant une lésion au-dessus de Th 6
    • A distance d'une section de la moelle cervicale
    • Syringomyélie post-traumatique
  • Neuropathies périphériques : hyperhidrose (++ épisodique) possible au cours de la dysautonomie familiale, du syndrome d'insensibilité congénitale à la douleur, des neuropathies périphériques avec dysfonctionnement autonome

Hyperhidroses compensatoires

Représente une hyperhidrose du tronc et des membres inférieurs survenant après une sympathectomie thoracique (traitement d'une hyperhidrose palmaire ou faciale) ou chez des patients présentant un syndrome de rétention sudorale. Déclenchées par des stimuli thermiques ou l'exercice physique.

Toujours rechercher une anhidrose associée sur diabète (anhidrose distale), lésion de la moelle épinière et du tronc sympathique ou obstruction étendue des pores eccrines sur dermatose.

Hyperhidroses idiopathiques

Diagnostic d'exclusion d'une hyperhidrose isolée, parfois nocturne, déclenchée par le froid ou sous dépendance émotionnelle.

Prise en charge thérapeutique - Traitements

  • Traitement étiologique si possible. Réassurance pour les hyperhidroses émotionnelles et idiopathiques.
  • Pour les hyperhidroses non accessibles à un traitement étiologique, discuter selon les cas une abstention ou un traitement symptomatique par voie générale :
    • 1er choix = anxiolytiques
    • Semblent donner parfois de bons résultats : anticalciques (diltiazem 30-60 mg 4x/ jour)
    • Les anticholinergiques et les inhibiteurs centraux sont à proscrire (effets secondaires disproportionnés au bénéfice)
  • Antiperspirants (++ chlorure d'aluminium hexahydraté à 20-25% dans l'alcool éthylique) : ++ pour les hyperhidroses axillaires modérées
  • Ionophorèse : ++ pour les hyperhidroses palmo-plantaires
  • Chirurgie en cas d'hyperhidrose sévère et résistance aux autres traitements : curetage sous-cutané, sympathectomie thoracique endoscopique (! Hyperhidrose compensatrice dans d'autres parties du corps dans 50-95%)
  • Hygiène élémentaire