Lithiase biliaire, cholécystite et angiocholite

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  Auteur(s) : Dr Shanan Khairi
  Date de dernière édition : 4/11/2022

Une lithiase biliaire correspond à la présence d'un calcul dans les voies biliaires. Une cholécystite correspond à l'inflammation des voies biliaires accessoires (vésicule biliaire et canal cystique) et une angiocholite à l'inflammation de la voie biliaire principale. Les cholécystites et angiocholites sont à risque de se compliquer d'une surinfection bactérienne de la bile et secondaires dans l'immense majorité des cas à une obstruction lithiasique des voies biliaires.

Il s'agit de pathologies fréquemment rencontrées tant en pratique ambulatoire qu'aux urgences.

Lithiases biliaires

Une lithiase biliaire correspond à la présence d'un calcul dans les voies biliaires.

Types de calculs

  • Calculs cholestatiques (les plus fréquents) : composés de plus de 50% de cholestérol
    • Facteurs de risque : sursaturation en cholestérol (sexe féminin, hérédité, âge, grossesse, obésité, amaigrissement rapide, hypertriglycéridémie, hyperchol, œstrogènes, progestatifs, fibrates, résection iléale ou colique, iléopathies, mucoviscidose,…) + hypomotilité vésiculaire (grossesse, jeûne, octréotide, médroxyprogestérone, nutrition parentérale, inflammation,…)
  • Calculs pigmentaires :
    • noirs (bilirubine non conjuguée) : sur hémolyse chronique, cirrhose, idiopathique
    • bruns (bilirubinate de calcium) : sur récidive lithiasique après cholécystectomie, sténoses des voies biliaires, primitifs (plus fréquemment chez les asiatiques)
  • Boue biliaire (sludge) : agglomérat de particules enrobé dans un gel muqueux
    • Plus souvent des particules de cholestérol
    • Peut accompagner ou précéder les calculs
    • Clinique semblable aux calculs

Clinique

  • 80% des patients sont asymptomatiques et ne nécessitent aucune prise en charge
  • 20% sont symptomatiques :
    • Douleur biliaire ("colique hépatique") : prédomine à l'épigastre ou l'hypochondre droit, irradiation possible en arrière et en haut à droite, début brutal, atteint rapidement son intensité maximale et est continue sans paroxysme durant quinze minutes à quelques heures, intense, aggravée à l'inspiration profonde.
      • Examen clinique : douleur provoquée ou défense épigastrique et à l'hypochondre droit, augmentée par l'inspiration profonde qu'elle bloque (signe de Murphy, très sensible, peu spécifique)
    • Nausées, dyspepsie, céphalées, douleurs atypiques de l'hypochondre droit
    • Fièvre → rechercher cholécystite ou angiocholite
    • Urines foncées ou ictère → lithiase cholédocienne ?

A noter que chez les cholécystectomisés la prise de codéine peut déclencher dans l'heure une douleur biliaire avec altération transitoire des tests hépatiques.

Examens complémentaires

  • Biologie :
    • Le plus souvent (sub)-normale en l'absence de complication ou de lithiase de la voie biliaire principale
  • Echographie : examen de première intention (mais 5 à 10% de faux négatifs)
    • En cas de négativité mais avec une forte suspicion clinique, on procédera à un CT-scanner
  • CT-Scanner :
    • Utile en cas d'échographie négative ou pour montrer d'éventuelle lésions de pancréatite associée

Les autres examens n'ont d'utilité qu'en cas de suspicion de complications :

  • Echo-endoscopie
  • Bili-IRM
  • Cholangiographie rétrograde
  • Cholangiographie peropératoire

Diagnostic différentiels

Penser également à certaines présentations atypiques de : infarctus myocardique, péricardite, pneumonie ou pleurésie droite, ulcère perforé, hépatopathie, tumeurs, appendicite sous-hépatique,…

Complications

  • Cholécystite
  • Angiocholite
  • Pancréatite aiguë

Traitements

Hospitalisation uniquement en cas de clinique sévère ou d’intervention rapidement programmée, sinon traitement per os en ambulatoire

  • Antispasmodique IV (ex : spasfon ou buscopan 40 mg puis 3 x 20mg/ 24 heures) + anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS, ex : voltaren 75 mg puis 2 x 75 mg/ 24 heures) +- paracetamol IV 3 x 1 g/ jour - relais per os si patient soulagé et prise en charge ambulatoire
    • Si contre-indication aux AINS (suspicion d'ulcère,...) : paracétamol IV 2 g ou morphinique
    • Les morphiniques sont classiquement contre-indiqués, mais ne pas hésiter à y recourir en cas de douleur résistante (ex: morphine 10 mg SC)
  • Lithiase vésiculaire :
    • Traitement médical seul en cas de lithiase vésiculaire non compliquée et non calcifiée de diamètre inférieur à 15 mm chez un patient refusant la chirurgie ou ayant une contre-indication : acide ursodésoxycholique 7,5 mg/ kg/ jour (1/3 au matin et 2/3 au soir) jusqu'à disparition des calculs, avec échographie de contrôle 1x/ 6 mois
    • Sinon : cholécystectomie, à réaliser endéans la semaine (une lithotritie est un second choix)
  • Régime vésicule
  • Lithiase de la voie biliaire principale (sans cholécystite) : sphinctérotomie à priviliégier
  • Lithiase intra-hépatique : rare, elle nécessite une prise en charge en centre spécialisé

Cholecystite

Une cholécystite correspond à l'inflammation des voies biliaires accessoires (vésicule biliaire et canal cystique). Elle est quasi toujours secondaire à une obstruction lithiasique bien qu'il existe de rares cholécystites primitives ou résultant d'une pathologie systémique.

Cholecystite aiguë

Clinique typique : douleur biliaire augmentée à l'inspiration et à la pression, nausées, vomissements, fièvre supérieure à 38,5°C, défense de l'hypochondre droit, éventuelle palpation d'une grosse vésicule. Possibles forme sévère avec retentissement hémodynamique et troubles de la conscience (marquant fréquemment une gangrène vésiculaire ou péritonite biliaire avec iléus).

Biologie : augmentation des polynucléaires neutrophiles, tests hépatiques normaux (si anormaux : probable lithiase associée de la voie biliaire principale).

Hémocultures à prélever systématiquement

Cholecystite chronique

Clinique = souvent pas ou peu symptomatique. Possible survenue de poussées de cholécystites aiguës, possible évolution vers des fistules bilio-digestives. Rarement : cancérisation, plus fréquent en cas d'évolution vers une "vésicule porcelaine" (qui justifie une cholécystectomie prophylactique).

Traitements

Vidéo d'une cholécystectomie laparoscopique réalisée pour cholécystite aiguë.

Hospitalisation !

  • Antispasmodique IV (ex : spasfon ou buscopan 40 mg puis 3 x 20 mg/ 24 heures) + anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS, ex : voltaren 75 mg puis 2 x 75/ 24 heures) +- perfusalgan 3 x 1 g/ 24 heures
    • Si contre-indication aux AINS (suspicion d'ulcère !) : perfusalgan 2 g ou morphiniques
    • Les morphiniques sont par principe contre-indiqués, mais ne pas hésiter à y recourir en cas de douleurs résistante (ex: morphine 10 mg SC ou 2 à 5 mg en IV lent)
  • Régime vésicule
  • Antibiothérapie empirique couvrant les Gram négatifs, les streptocoques et les anaérobies. Après la prise des hémocultures. Exemple de schéma :
    • Augmentin 3 x 2 g/ jour IV (+ amikacine 15 mg/ kg IV en cas de clinique sévère)
    • Si nosocomial : ceftazidime 3 x 2 g IV +- amikacine 15 mg/ kg IV (en cas de clinique grave ou d'antibiothérapie large spectre préalable : meropenem 3 x 1 g IV + amikacine 15 mg/ kg IV)
  • Avis chirurgical : cholécystectomie dans la semaine de survenue des symptômes ou en urgence si complications (nécrose, hémorragie,…)

Angiocholite

Une angiocholite correspond à l'inflammation de la voie biliaire principale, généralement associé à une infection bactérienne (++ E. Coli, Klebsellia, Ps. aeruginosa, entérocoques, proteus) de la bile. La cause principale est la présence d'une lithiase obstruant le cholédoque. Causes plus rares : compression du cholédoque par une tumeur des voies biliaires, une tumeur hépatique, une tumeur pancréatique, une tumeur de la papille ou du duodénum, des adénopathies,...

Clinique

Clinique typique : triade de Charcot (complète dans seulement < 50-70% des cas ! Dans 10% des cas on a un ictère isolé et dans 30% l'ictère est absent) s'installant en 24 à 48 heures = douleurs biliaires puis + fièvre avec frissons puis + ictère. Des formes sévères nécessitant une prise en charge en soins intensifs sont possibles.

Examens complémentaires

Biologie = augmentation des polynucléaires neutrophiles dans 50-80%, anomalies des tests hépatiques quasi-constantes (hyperbilirubinémie à prédominance conjuguée, élévation précoce des transaminases à ~ 5 x la normale, augmentation des PAL et GGT modérée dans les jours suivants), CRP généralement modérément augmentée. La diminution du PT < 70% signe une insuffisance hépato-cellulaire et constitue un signe de gravité. La lipasémie est fréquement discrètement élevée mais si elle est > 3 x la normale, cela signe une pancréatite associée.

Hémocultures à réaliser systématiquement

Diagnostic : ici l'échographie est fréquemment négative → si négative, recours à une écho-endoscopie ou bili-IRM

Complications

Abcès hépatiques, thrombose septique de la veine porte, cirrhose biliaire à terme (si épisodes récurrents sur lithiase persistante non traitée)

Traitements

Hospitalisation !

  • Antispasmodique IV (ex : spasfon ou buscopan 40 mg puis 3 x 20 mg/ 24 heures) + anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS, ex : voltaren 75 mg puis 2 x 75 mg/ 24 heures) +- paracétamol IV 1 g 3 x/ jour
    • Si contre-indication aux AINS (suspicion d'ulcère,...) : paracétamol IV 2 g
    • Les morphiniques sont par principe contre-indiqués, mais ne pas hésiter à y recourir en cas de douleur résistante (ex: morphine 10 mg SC)
  • Antibiothérapie couvrant les Gram négatifs, les streptocoques et les anaérobies, après la prise des hémocultures. Exemple de schéma :
    • Augmentin 3 x 2 g IV (+ amikacine 15 mg/ kg IV en cas de clinique sévère)
    • Si nosocomial : ceftazidime 3 x 2 g IV +- amikacine 15 mg/ kg IV (en cas de clinique grave ou d'antibiothérapie large spectre préalable : meropenem 3 x 1g IV + amikacine 15 mg/ kg IV)
  • Avis gastro-entérologique : drainage biliaire, extraction et sphinctérotomie en cas de clinique sévère,…
  • Avis chirurgical : cholécystectomie à distance

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD