Pathologie cérébro-vasculaire et hémopathies
Date de dernière édition : 24/09/2024
Les hémopathies représentent des causes rares d'accidents vasculaires cérébraux (≈ 1% dans la population générale mais 2 à 16% chez les < 50 ans).
En cas d'hémopathie connue, de patient de < 50 ans, ou de certains signes d'appels cliniques ou biologiques, elles doivent être systématiquement évoquées (éventuel traitement spécifique) lors d'un accident vasculaire cérébral.
Pathologies des hématies : anémies
Anémies aiguës sévères (++ d'origines hémorragiques, ++ à < 7g/ dl) +- hypoTA sévères → risque d'AVC ischémiques (++ jonctionnels ou distaux en présence d'une sténose artérielle favorisante).
Anémies chroniques (++ d'origines ferriprives sur hémoragie occulte) → thrombocytose secondaire et état d'hypercoagulabilité → facteur favorisant d'AVC ischémiques ou de TVC (case reports).
→ traitement général, correction de l'anémie et de sa cause.
Pathologies des hématies : hémoglinopathies
Drépanocytose
Des AVC sont rapportés chez 3 à 17% des drépanocytaires homozygote et chez 2 à 5% des hétérozygotes. Constitue une des étiologies du syndrome de Moya-Moya.
AVC ischémiques
AVC ischémiques dans 75% des cas. ++ dans l'enfance chez les homozygotes, âge moyen de 30 ans chez les hétérozygotes.
Très rare : embolies graisseuses < crises vaso-occlusives osseuses étendues.
Autres
AVC hémorragiques (HIP, plus rarement HSA isolées) dans 25% des cas, ++ 20-30 ans. Dans les cas d'HSA, on retrouve un anévrisme dans 30 à 50% des cas.
Les TVC sont exceptionnellement rapportées, généralement en cas d'anomalies de l'hémostase associées.
Prise en charge
Traitement à la phase aiguë : mesures générales, hyperhydratation, morphine, avis hémato pour échanges transfusionnels (but = baisser l'HbS sous 30% sans trop aggraver l'anémie et l'hyperviscosité).
Traitement en chronique à discuter avec hémato : échanges transfusionnels au long cours (! risque d'hémochromatose, allo-immunisation, infectieux !), hydroxy-urée (hydrea) ou transplantation médullaire.
En cas de syndrome de Moya-Moya symptomatique (risque élevé de récurrences, des procédures de revascularisation chirurgicale peuvent être envisagées (confronter le risque aux répercussions hémodynamiques).
Divers
L'implication des thalassémies majeures et intermédiaires a été rarement rapportée dans des AVC ischémiques. Le risque semble majoré au décours de transfusions sanguines et chez les patients porteurs d'une thrombocytose secondaire à une splénectomie.
Pathologies des hématies : hémoglobinurie paroxystique nocturne
Etiologie reconnue de TVC. Le traitement anticoagulant habituel de la TVC est controversé dans ce cas (risque d'activation par l'héparine des plaquettes atteintes).
Etiologie controversée des AVC ischémiques.
Pathologies des hématies : polyglobulies
AVC ischémiques décrits chez 10 à 20% des patients atteints de polyglobulies essentielles. Augmentation importante du risque de TVC. Augmentation mineure du risque d'HIP (polyglobulies sévères et évoluées). Parmi les polyglobulies secondaires, celle liée aux néphropathies est particulièrement thrombogène. Dans les pseudo-polycytémies (++ âge moyen, obèses, fumeurs, HTA) le rôle de l'Htc est discuté.
En aigu : mesures générales + demander avis hémato pour envisager traitement par saignées / spécifique.
En chronique : traitement étiologique si polyglobulie secondaire, envisager traitement par myélosuppression (répéter les saignées augmente le risque thrombotique), AAS 100mg/j si pas de risque hémorragique majeur.
Pathologies des plaquettes : thrombocytémies
Les AVC ischémiques représentent 1/3 des manifestations thrombotiques des thrombocytémies essentielles (++ AIT) et concernent 3 à 9% des patients. ++ occlusion des petits vaisseaux.
Les TVC sont rares et les AVC hémorragiques exceptionnels. Pas de corrélation entre le nombre de plaquettes et la survenue de thromboses. Prophylaxie secondaire : antiagrégation, envisager chimiothérapie..
Responsabilité discutée des thrombocytoses secondaires (< splénectomie, anémie ferriprive,…).
Pathologies des plaquettes : thrombopénies
Risque hémorragique, ++ si Pq < 20.000/mm3. Attention particulière aux thrombopénies graves induites par l'héparine.
Pathologies des plaquettes : anomalies qualitatives
Hypo-activité plaquettaire (sur syndromes myéloprolifératifs, paraprotéinémies, iatrogènes,…) → augmentation du risque hémorragique.
Quelques cases reports d'AVC ischémiques sur hyperagrégabilité / hyperadhésion plaquettaire. Mais dans ce cas le diagnostic doit être confirmé à distance : les marqueurs de l'activation plaquettaires sont souvent augmentés secondairement à la thrombose.
Pathologies des plaquettes : purpura thrombotique thrombocytopénique
La survenue d'AIT volontiers récidivants est fréquente au cours des PTT (fièvre, néphropathie, thrombocytopénie, anémie hémolytique microangiopathique) (< microthrombis hyalins disséminés). Traitement : échanges plasmatiques.
Pathologies des leucocytes : leucémies
Des AVC hémorragiques se rencontrent fréquemment dans tous les types de leucémies. Sur infiltration tumorale, lésions des parois vasculaires, thrombopénie secondaire (infiltration médullaire, chimiothérapie, CIVD), insuffisance hépatiques, infections.
Les AVC ischémiques et les TVC se rencontrent surtout dans les leucémies myéloïdes, leucémies aiguës lymphoblastiques et les lymphomes malins. Sur hyperviscosité, leucostase (sur diminution de la déformabilité des GB), coagulopathies sub-aiguës de consommation.
Pathologies des leucocytes : syndrome hyperéosinophilique
→ majoration du risque d'AVC ischémiques < cardio-emboliques sur cardiopathie sous-jacente/ fibrose endo-myocardique, vasculopathies diffuses, toxicité neuronale directe. Les hémorragies semblent plus rares.
Coagulopathies associées à un risque hémorragique
Congénitales : déficits en facteur VII liée à X/ en facteur IX, afibrogénémies autosomiques récessives, déficits sévères en facteurs VII/ X/ XI/ XIII. → AVC HH à tous âges, FF = traumas.
Acquises < insuffisance hépatique,anticoagulation, fibrinolyse, CIVD aiguës (néos sous-jacents ++ hémopathies malignes, sepsis sévères).
Coagulopathies associées à un risque de thrombose
Déficits en inhibiteurs physiologiques de la coagulation : antithrombine, protéine C, protéine S
→ majore le risque de TVC. Risque toujours discuté concernant les AVC ischémiques artériels.
Déficits constitutionnels : autosomiques dominants ++++, quantitatifs ou qualitatifs, rôle démontré du déficit en antithrombine et de façon plus modérée en protéine C pour les TVC. Rôle discuté pour le déficit en protéine S.
Déficits acquis : Rôle discuté – traitement par AVK (protéines C et S) et héparine (antithrombine), hépathopathies sévères, syndromes néphrotiques, CIVD, grossesse (antithrombine et protéine S),… phase aiguë des AVC (activation de la coagulation, inflammation ou iatrogène) → dosages à vérifier systématiquement à distance.
Anomalies des facteurs procoagulants
Hyperfibrinogénémie → augmentation du risque d'AVC ischémiques artériels athéromateux (++ lacunaires) et cardio-emboliques (sur augmentation du risque de coronopathies).
Résistance à la protéine C activée (autosomique dominant, dans 90% sur mutation facteur V) = 1ère cause de thrombophilie familiale → augmentation modérée du risque d'AVC ischémique artériel (RR 1,3-1,9) + augmentation du risque de TVC (mutation retrouvée jusqu'à 15 à 20% des TVC).
Mutation du gène de la prothrombine → augmentation modérée du risque de TVC (RR 1,03-1,9, retrouvée dans 6 à 20% des cas).
Augmentation de l'activité du facteur VIIa et excès de l'inhibiteur de l'activateur du plasminogène, facteur VIII → FR des coronopathies, non démontré pour les AVC. Pas plus d'EBM pour la protéine Z. En outre, à contrôler à distance de l'épisode aigu (peuvent augmenter du fait de la thrombose).
Etats d'hypofibrinolyse
Déficits héréditaires en plasminogène quantitatifs / qualitatifs, constitutionnels / acquis → majoration discutée du risque de TVC, (AVCisch artériels ?).
Dys / hypofibrinogénémies = rares, autosomiques dominantes → TVC récidivantes chez 10% des patients. Cas d'AVC ischémiques artériels rapportés.
Autres déficits = anecdotiques, très discutés.
CIVD sub-aiguës et chroniques
Se rencontrent généralement < néos (++ adénocarcinomes, tumeurs ovariennes papillaires, lymphomes) = sécrétion de facteurs activant la coagulation, la fibrinolyse et les fonctions plaquettaires. → risque d'AVC ischémiques artériels récidivants multifocaux + risque d'AVC cardio-emboliques sur endocardites thrombotiques non bactériennes.
Traitement = étiologique. L'anticoagulation corrige certaines anomalies biologiques mais n'est pas démontrée prévenir les AVC.
Syndrome des anticorps antiphospholipides
Les "anticorps antiphospholipides sont un groupe d'Ac (ex : Ac anti-cardiolipines, anticoagulant circulant). Leur présence à certains titres + une manifestation thrombotique (thromboses artérielles/ veineuses, fausses couches répétées) définit un syndrome des Ac antiphospholipides.
Syndrome primaire ou secondaire (< LED,…). FR cérébro-vasculaire démontré chez l'enfant et le jeune adulte. Débattu pour les sujets âgés. Physiopathologie: dysfonctionnement endothélial, activation plaquettaire, inhibition d'anticoagulants endogènes, anomalies de la fibrinolyse.
→ risque d'AVC ischémiques (mode de révélation dans 20% des cas) par thrombose in situ ou cardio-embolique (risque majoré de thrombi sur les valves cardiaques) >>>>> risque de TVC.
Traitement : prévention secondaire par anticoagulation +- traitement étiologique (corticoïdes, immunosuppresseurs,…) en cas de syndrome secondaire.
Paraprotéinémies : myélome multiple, macroglobulinémie
→ risque majoré d'AVC hémorragique, ++ en cas d'association à une thrombopénie ou cryoglobulinémie.
→ risque majoré d'AVC ischémiques sur hyperviscosité sur hyperprotéinémie et anomalies qualitatives des paraprotéines.
Traitement : amélioration possible par plasmaphérèses, traitement étiologique.
Facteurs hémorrhéologiques - généralités
Principaux déterminants de la viscosité : hématocrite, degré d'agrégation des GR, déformabilité des GR, protides.
Hyperviscosité → diminution Qsang + formation de thrombi dans les capillaires et artérioles.
Facteur favorisant d'AVC en cas d'hyperviscosité : constriction artériolaire (++ sur hypoxie).
Etiologies : syndromes myéloprolifératifs, hémoglinopathies, dysglobulinémies, inflammations, états de choc, brûlures, toxémies gravidiques, diabètes, hyperlipoprotéinémies, néoplasies, thromboses artérielles et veineuses,…
Bibliographie
Bradley WG et al., Neurology in clinical practice, 5th ed., Butterworth-Heinemann, e-dition, 2007
EMC, traité de neurologie, Elsevier, 2018