Syndrome d'occlusion intestinale

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  Auteur(s) : Dr Shanan Khairi
  Date de dernière édition : 22/09/2024

Un syndrome d'occlusion intestinale est défini par l'association variable de symptômes et signes cliniques (cf infra) résultant d'un arrêt complet du transit intestinal. Lorsque cet arrêt est incomplet, on le qualifie habituellement de sub-occlusion.

Il survient préférentiellement chez les patients de plus de 50 ans avec un pic à 70 ans. Dominé par les douleurs abdominales, il est à l'origine de ~ 10% des "abdomens aigus".

L'essentiel de la démarche consiste à identifier les étiologies mécaniques et vasculaires, à considérer à priori comme des urgences chirurgicales (risque de nécrose et de perforation digestive), et à assurer un traitement symptomatique.

Synonymes : syndrome d'occlusion digestive, syndrome d'occlusion abdominale, syndrome occlusif.

Etiologies

Les mécanismes mécaniques et vasculaires sont parfois d'emblée intriqués (ex : volvulus → obstacle luminal + arrêt de la vascularisation du segment volvulé). Cependant, une occlusion mécanique se complique toujours à terme d'une souffrance vasculaire → cercle vicieux (obstacle → distension → augmentation de la tension pariétale → ischémie artérielle et stase veineuse → hypoxie → troubles de la perméabilité capillaire → hypersécrétion réflexe avec accumulation de liquide digestif et fermentation/ gaz → aggrave la distension → …).

Occlusions mécaniques 

  • Brides
  • Hernie étranglée
  • Obstacle endo-luminal (iléus biliaire, bézoard, parasites, fécalome,…)
  • Eventration
  • Sténose (tumeur, carcinose, Crohn, recto-colite ulcéro-hémorragique,…)
  • Invagination
  • Volvulus (torsion d'une anse digestive sur son axe vasculaire, favorisé par un dolichocolon)

Origine vasculaire

  • Strangulation, emboles,… ne pas rater un infarctus mésentérique !

"Occlusions abdominales" fonctionnelles

Les occlusions abdominales fonctionnelles, ou réflexes, correspondent à des anomalies de la contractilité intestinale sans atteinte anatomique vraie, par activation du système nerveux autonome digestif.

  • Troubles métaboliques (hypokaliémie,...)
  • Iatrogène (morphiniques, neuroleptiques,...)
  • Inflammation (colique néphrétique, pancréatite, post-chirurgicale,…), infections (appendicite, sigmoïdite,…)

Démarche diagnostique

Clinique 

Le diagnostic repose par définition sur quatre signes cliniques dont l'association est inconstante :

  • Douleur abdominale aiguë intense dans > 50%, pas de valeur localisatrice, installation souvent rapide, évolution souvent d'abord paroxystique puis constante
  • Arrêt des selles et des gaz (possibles faux transits ou même diarrhée par persistance de selles en aval)
  • Nausées et vomissements : présents dans ~50-80%, de type variables.
  • Distension et météorisme abdominal à la percussion

Recherche étiologique : antécédents vasculaires, chirurgie abdominale, médicaments, méléna, palpation des orifices herniaires (hernie étranglée : orifices cruraux, ombilical, inguinaux, éventrations), asymétrie abdominale (++ volvulus colique), tympanisme localisé, "bruits de lutte" (++ mécanique), "boudin d'invagination", palpation d'une masse, contexte évocateur d'une occlusion fonctionnelle (sepsis, pancréatite, iléus post-opératoire, clinique plus modérée). 

Signes de localisation de l'obstruction :

  • Occlusion grêle : douleur constante aiguë, vomissement précoces et abondants, présence d'une cicatrice abdominale ou d'une hernie
  • Occlusion colique (penser à un cancer) : vomissements absents ou tardifs, arrêt du transit précoce et brutal, météorisme franc

Signes de gravité : début brutal des douleurs, douleurs constantes, silence auscultatoire, vomissements fécaloïdes, présence de signes péritonéaux, fièvre, déshydratation, signes de choc, sang au toucher rectal (ischémie), vieillard ou immunodéprimé

Biologie et gazométrie 

Rechercher des signes de gravité : nécrose (acidose métabolique, hyperleucocytose), déshydratation extracellulaire (hémoconcentration, insuffisance fonctionnelle). Recherche de signes étiologiques (hémato-CRP, ionogramme, bilan hépatique, lipase).

Radiographie AAB (couché + debout si possible)

  • Niveaux hydro-aériques :
    • Plus larges que hauts, bandes radio-opaques (plissement des valvules conniventes) → ++ occlusion grêle
    • Plus hauts que larges avec haustrations coliques, périphériques en cadre, anse unique en arceau (++ volvulus) → ++ occlusion colique
  • Distension grêle ou colique avec présence d'air dans le rectum → ++ occlusion fonctionnelle

Obstructions intestinales - radiographies

CT-scan abdomino-pelvien avec et sans PCI

Obstructions intestinales - tomodensitométries

  • Diagnostic radiologique d'occlusion aiguë : diamètre > 25 mm pour le grêle et > 60 mm pour le colon
  • Siège de l'occlusion = zone transitionnelle (alternance entre une anse plate et une anse distendue).
  • Etiologie parfois évidente : boudin d'invagination, sténose tumorale, hématome pariétal, compression extrinsèque, signes d'étranglement (anses distendues en C ou U, aspect radiaire des vaisseaux mésentériques vers les anses dilatées), signe du tourbillon (enroulement des structures mésentériques convergeant vers le site de torsion, évoque un volvulus), hernies internes, pathos vasculaires, foyer infectieux d'une occlusion fonctionnelle,…
  • Signes de gravité :
    • Distension caecale > 9 cm → risque important de perforation
    • Souffrance pariétale :
      • Congestion veineuse intestino-mésentérique : épaississement pariétal circonférentiel en cible par œdème sous-muqueux, perte de transparence du mésentère, transsudat intrapéritonéal
      • Nécrose transmurale par ischémie artérielle : amincissement pariétal, retard/ absence de rehaussement après injection, infiltration hydrique du mésentère, épanchement intrapéritonéal, pneumatose pariétale, pneumopéritoine, aéroportie, aéromésentérie

Obstructions intestinales - tomodensitométries

Prise en charge thérapeutique - Traitements

Occlusion intestinale


  • La responsabilité de la prise en charge relève d'un chirurgien
  • Traitement étiologique si possible :
    • Brides → discuter chirurgie ou essai de traitement médical seul (début progressif, efficacité de la sonde et des antalgiques sur la douleur, pas de signe de gravité clinique ni biologique ni radiologique, antécédents d'épisodes identiques)
    • Hernies ou éventrations étranglées → chirurgie +++
    • Invagination → chirurgie +++
    • Ischémie artérielle = infarctus mésentérique → traitement interventionnel ou chirurgie de revascularisation ou de résection
    • Ischémie veineuse → discuter anticoagulation, chirurgie uniquement en cas de complications perforatives
    • Sténoses inflammatoires, tumorales, carcinomatose →  chirurgie +++ ou stenting (++ en cas de néoplasie dépassée)
    • Colites aiguës vasculaires ou inflammatoires : traitement médical en 1ère intention en l'absence de signe de gravité, chirurgie sinon
    • Iléus biliaire → chirurgie +++
    • Volvulus → traitement endoscopique, chirurgie en cas d'échec
    • Fécalome → laxatifs, extraction
  • Traitement symptomatique :
    • En cas d'occlusion fonctionnelle : arrêter tout médicament favorisant non indispensable, envisager néostigmine 2,5 mg IV en 3 minutes à répéter 1x/ 4 heures
    • Discuter l'opportunité d'essai de lavements selon l'étiologie présumée
    • Sonde naso-gastrique en aspiration
    • Hydratation IV, minimum 2 l de mixte/ 24 heures
    • Correction des troubles métaboliques et ioniques
    • Antalgiques adaptés (morphine SC ou IV souvent nécessaire)
    • Chirurgie en cas d'échec ou de complications.