Anévrismes de l'aorte abdominale (AAA)

Aller à : navigation, rechercher
  Auteur(s) : Dr Shanan Khairi
  Date de dernière édition : 22/09/2024

Un anévrisme de l'aorte abdominale (AAA) est une dilatation intéressant toutes les tuniques de la paroi artérielle et de diamètre antéro-postérieur supérieur à 35 mm chez l'homme et supérieur à 30 mm chez la femme (certains considèrent une limite de 30 mm indépendamment du sexe). La prévalence est ~1 % chez l'homme de 55 à 64 ans, elle augmente ensuite de 2 à 4% par 10 ans. Selon les séries, il est présent chez 3 à 8 hommes pour une femme et prédomine légèrement au sein des ethnies caucasiennes. Il est généralement peu ou pas symptomatique et de découverte fortuite. Sa prise en charge varie selon les cas d'une simple surveillance et traitement des facteurs de risque afin de prévenir son développement à une cure chirurgicale ou endovasculaire. Ses complications sont généralement d'évolution dramatique. La localisation préférentielle est sous-rénale (avec extension aux artères iliaques jusque dans 50% des cas), la plus à risque de complications.

Etiologies et facteurs de risque

  Voir l'article détaillé: Anévrismes artériels

Ce sont ceux de tout anévrisme (voir chapitre spécifique). Cependant, l'AAA est dans l'immense majorité des cas d'origine athéromateuse.

Clinique et circonstances de découverte

  • La plupart sont asymptomatiques ou paucisymptomatiques, parfois découverts fortuitement :
    • Imagerie pour pathologies digestives, urinaires ou lombaires
    • Palpation abdominale : masse pulsatile expansive (refoulant les mains à chaque systole, très évocateur) parfois soufflante, signe de De Bakey (possibilité de glisser le tranchant de la main entre le pôle supérieur de la masse et l'auvent costal = anévrisme sous-rénal ++)
  • Symptomatiques en cas de complications, cf infra
  • Présentation particulières des AAA inflammatoires (formation d'une fibrose périanévrismale pouvant s'étendre aux organes de voisinage et/ ou englober des segments aortiques non anévrismaux) :
    • Douleurs abdominales ou lombaires, amaigrissement, anorexie, dégradation de l'état général, fièvre, coliques néphrétiques, oedèmes des membres inférieurs

La majorité des cas sont de découverte fortuite ou découverts lors de la survenue de complications (++ lors d'une rupture). Hors complications, ils peuvent (++ en cas de croissance rapide) être à l'origine d'une symptomatologie pauvre et non ou peu spécifique (douleurs abdominales, douleurs lombo-sacrées, troubles mictionnels), orientant trompeusement mais légitimement le praticien vers une mise au point lombaire ou digestive.

Evolution naturelle

  • L'augmentation de diamètre est très variable (variabilité individuelle + selon le diamètre de départ) mais en moyenne de ~ 2,5 mm/ an
  • Le risque de rupture dépend de la tension de paroi = Pression x Rayon / épaisseur pariétale (= Loi de Laplace). Les facteurs de risque sont :
    • Le diamètre maximal :
      • 40-49 mm → 1,3%/ an
      • 50-59 mm → 5 à 10%/ an
      • 60-69 mm → 10 à 20%/ an
      • 70-79 mm → 20 à 40%/ an
    • Augmentation rapide du diamètre (risque significatif pour > 5 mm/ 6 mois)
    • Hypertension artérielle non contrôlée

Complications et pathologies associées

Rupture d'Anévrisme de l'Aorte Abdominale

Complication redoutable, pouvant survenir spontanément ou suite à un traumatisme ou effort même minime, elle peut se présenter sous différentes formes :

  • Fissuration ("pré-rupture") et dissection → douleurs lombaires aiguës, hémodynamique stable, masse pulsatile sensible... clinique peu spécifique conduisant le plus souvent à un diagnostic erroné jusqu'à la survenue d'une véritable rupture
  • Rupture rétropéritonéale → douleurs lombaires aiguës, masse pulsatile à la palpation, hypotension et tachycardie  (parfois fugaces) avant la survenue d'un collapsus → mortalité globale ~ 50%
  • Rupture intrapéritonéale ou dans un organe creux (Rare. Duodénum, grêle, colon, veine cave inférieure) → se présente généralement par une mort subite ou un collapsus sévère brutal → mortalité globale > 90%

​De manière générale, la mortalité d'une rupture d'AAA avoisine les 100% en l'absence de prise en charge adéquate et (lorsque le patient est admis vivant aux urgences) est de 20 à 50% en cas de prise en charge appropriée.

Compression des organes de voisinage

  • Compression de la veine cave inférieur → oedèmes des membres inférieurs, exceptionnellement thrombose
  • Compression des urétères : douleurs lombaires, troubles de la miction, coliques néphrétiques

Thrombo-embolies

  Voir l'article détaillé: Ischémie aiguë des membres inférieurs

→ selon le site : "orteils bleus", ischémie d'un membre inférieur, infarctus rénaux, infarctus mésentériques,…

Eventuelles complications spécifiques à l'étiologie sous-jacente

Pathologies associées

Elles dépendent de l'étiologie sous-jacente. Cependant, dans la grande majorité des cas, il s'agit des pathologies athéromateuses. En outre, de manière générale, on retrouve associé un anévrisme poplité chez 15% des patients porteurs d'un AAA.

Examens complémentaires et prise en charge des Anévrismes de l'Aorte Abdominale non compliqués

Anévrisme de l'aorte abdominale - bilan

La mortalité de la cure chirurgicale classique est faible (~ 4-8%) et les complications (pseudo-anévrismes, infections ou thromboses de prothèse) rares. La mortalité du traitement endoluminal est de 1,4 % et les complications encore plus limitées… cependant, le coût est plus élevé, le recul est encore faible et les contraintes anatomiques (contre-indication en cas de collet trop court, de tortuosités iliaques ou aortiques) importantes.

L'utilisation de β-bloquants a été démontré efficace chez les Marfan. Leur administration chez les autres patients ne bénéficiant pas d'un traitement chirurgical fait encore débat.

Traitement étiologique spécifique le cas échéant.

Selon l'étiologie, des pathologies associées doivent être recherchées. Une échographie à la recherche d'anévrismes poplités se justifie systématiquement.

Le schéma ci-dessus n'est bien sûr qu'une proposition à adapter aux pratiques du centre de référence. Certains considèrent un diamètre de 50 mm comme seuil d'intervention. Après une intervention non compliquée, un contrôle angiographique est recommandé à 1, 6 et 12 mois, puis 1x/ an.

Prise en charge des AAA rompus

Une rupture d'AAA constitue toujours une urgence chirurgicale (prothèse en Dacron) ou endovasculaire selon le degré d'expertise du centre hospitalier. Une prise en charge supportive pré-chirurgicale doit généralement être effectuée (fluid challenge et transfusions en cas de choc hémorragique sans dépasser 70 à 80 mmHg de PAM, privilégier les béta-bloquants et éviter les vaso-dilatateurs direct en cas d'hypertension sur le modèle des dissections de l'aorte thoracique). Profiter de ce délai pour confirmer le diagnostic par échographie avant intervention.

Bibliographie

Chung J, Epidemiology, risk factors, pathogenesis, and natural history of abdominal aortic aneurysm, UpToDate, 2024

Dalman RL et al., Management of asymptomatic abdominal aortic aneurysm, UpToDate, 2024

Dalman RL et al., Overview of abdominal aortic aneurysm, 2024

Jim J, Clinical features and diagnosis of abdominal aortic aneurysm, UpToDate, 2024

EMC, Traité d'Angéiologie, 2018