Maladie de Fahr - Calcifications idiopathiques des ganglions de la base

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  Auteur(s) : Dr Shanan Khairi
  Date de dernière édition : 22/09/2024

La maladie de Fahr ou calcifications idiopathiques des ganglions de la base (CIGB) est définie comme l'association de calcifications idiopathiques bilatérales des noyaux de la base, et éventuellement du cervelet et/ ou du reste du parenchyme cérébral, à des troubles neurologiques progressifs en rapport et n'ayant pas d'autre explication.

Elle est exceptionnelle, peut se rencontrer dans le cadre d'une histoire familiale ou de façon sporadique, est principalement décrite chez des patients de 30 à 50 ans et est de pronostic variable. Il n'y a actuellement pas de prise en charge autre que symptomatique. L'essentiel du bilan consiste à exclure les diagnostics différentiels potentiellement curables ou accessibles à un traitement étiologique.

Formes familiales et sporadiques et éléments de génétique

On distingue les :

  • Cas familiaux de type autosomal dominant (très exceptionnellement récessif) → FIBGC (familial idiopathic basal ganglia calcification, pénétrance généralement très élevée)
  • Cas sporadiques

Des mutations sur deux gènes, SLC20A02 et PDGFRB, ont actuellement été identifiées, rendant compte d'un peu plus de la moitié des cas.

Radiologues, cliniciens, généticiens et débats sémantiques...

Il n'est pas rare de voir la découverte incidentelle de calcifications des noyaux de la base sur un CT-scanner protocolée "maladie de Fahr" par des radiologues. Cela n'a aucun sens et est source de confusion pour les cliniciens.

Il était d'usage d'employer l'expression "maladie de Fahr" pour les calcifications idiopathiques symptomatiques et "syndrome de Fahr" pour les calcifications secondaires (cf diagnostics différentiels). Cette habitude qui persiste encore est également source de confusion et à abandonner.

Enfin, nombre d'auteurs de publications en génétique ont abandonné l'expression "maladie de Fahr" au profit de "FIBGC" pour tous les cas. Etant donné l'existence de cas sporadiques et de l'absence de mutations génétiques identifiées dans tous les cas, cet usage ne semble actuellement pas justifié.

Clinique

Par définition, la maladie de Fahr suppose un caractère symptomatique. Elle peut associer de manière variable des troubles cérébelleux, des mouvements anormaux (chorée, syndrome extrapyramidal, dystonies,...) et troubles de la marche, des troubles psychiatriques, des troubles cognitifs susceptibles d'évoluer vers une démence sous-corticale, des troubles phasiques, des crises épileptiques et des troubles urinaires.

La majorité des cas sont décrits comme débutant entre 30 et 50 ans.

L'évolution clinique se fait sur un mode insidieux et le handicap fonctionnel cumulé est imprévisible. Une clinique d'apparition brutale ou rapidement progressive n'est pas évocatrice du diagnostic et doit faire suspecter des calcifications secondaires à une pathologie sous-jacente (voir diagnostics différentiels) ou une découverte de hasard de calcifications sans rapport avec la symptomatologie.

Diagnostic et diagnostics différentiels

Diagnostic différentiel

  Voir l'article détaillé: Calcifications des noyaux de la base

Le diagnostic différentiel de ce type de calcifications est abordé dans un chapitre particulier. Il consiste d'abord à les distinguer d'autres types de dépôts et des simples calcifications liées au vieillissement physiologique (très rarement symptomatiques) puis à éliminer les calcifications secondaires (causes innombrables mais dominées par les endocrinopathies). A noter que dans le cadre des calcifications secondaires, l'éventuelle symptomatologie neurologique est plus souvent due aux troubles métaboliques (et donc d'installation fréquemment aiguë à sub-aiguë) qu'aux calcifications cérébrales qui n'en sont alors qu'un marqueur radiologique.

Conditions de diagnostic

Les analyses génétiques n'étant pas de routine clinique et toutes les mutations supposées n'étant pas identifiées, le diagnostic positif exige toujours l'association de :

  • Calcifications significatives (très relatif...) bilatérales des noyaux de la base
  • Troubles neurologiques progressifs pouvant être mis en rapport avec ces calcifications et non expliqués par une autre pathologie
  • Absence d'anomalie métabolique et absence d'argument pour une maladie systémique, une maladie mitochondriale, une cause infectieuse/ toxique/ traumatique ou un syndrome congénital susceptibles d'expliquer ces calcifications

Examens complémentaires

On peut différencier trois groupes d'examens :

  • Examens établissant la présence des calcifications nécessaires mais non suffisantes au diagnostic :
    • CT-scanner cérébral : hyperdensités bilatérales relativement symétriques de densité calcique au sein des noyaux de la base +- des lobes cérébelleux. De façon inconstante, on peut retrouver des calcifications disséminées dans le reste du parenchyme cérébral.
    • IRM cérébrale : rarement utile (doute au CT-scanner entre des calcifications et des dépôts ferriques [les dépôts de cuivre apparaissent eux iso- ou hypodenses au CT-scanner])
  • Analyses génétiques :
    • Utilité discutable (implications éthiques au vu de l'absence de traitement efficace disponible, nombreux cas sans mutation identifiée). A ne réaliser que dans le cadre d'un conseil génétique raisonné.
  • Examens nécessaires afin d'exclure les diagnostic différentiels :
    • Systématiques = le minimum :
      • Biologie :
        • En première intention : ionogramme avec calcium et phosphore, PTH, vitamine D, VS, électrophorèse des protéines
        • En deuxième intention : auto-anticorps (maladie coeliaque, FAN, anti-ADN et anti-nucléaires, anti-SSA, anti-SSB, anti-RNP, anticoagulant lupique, anti S, facteur rhumatoïde)
    • Conditionnels = selon la situation clinique :
      • IRM cérébrale, ponction lombaire, électroencéphalogramme, potentiels évoqués visuels, biopsies de lésions cutanées,...

Des examens électro-encéphalographiques sont également utiles en cas de doute quant à des crises épileptiques secondaires (exceptionnel).

CT-scanner cérébral - Calcifications bilatérales des noyaux centraux

CT-scanner cérébral - Calcifications bilatérales cérébelleuses

CT-scanner cérébral - Calcifications diffuses du parenchyme cérébral relativement symétriques

Prise en charge thérapeutique - Traitements

Il n'y a pas de traitement curatif ou susceptible d'enrayer l'évolution de cette pathologie. La prise en charge se limitera à :

  • Prise en charge symptomatique le cas échéant selon l'expression clinique :
    • Référer à un service social
    • Kinésithérapie d'entretien de la marche
    • Prise en charge psychiatrique (éviter les neuroleptiques si possible vu le risque de mouvements anormaux)
    • Oxybutinine et prise en charge urologique en cas d'incontinence urinaire
    • Anti-épileptiques en cas de crises clairement établies
    • En cas de syndrome extrapyramidal, envisager de petites doses de l-dopa (peu voire pas efficace) à visée essentiellement compassionnelle (balance bénéfices / effets secondaires)
    • Evaluation sociale et neuropsychologique annuelle
  • A visée "compassionnelle" (aucune démonstration d'efficacité) :
    • Chélateurs du calcium (ex : étidronate de sodium) à envisager selon les demandes du patient et l'expression clinique.
  • Conseil génétique :
    • Très discutable sur le plan éthique au vu de l'absence de traitement étiologique. A envisager en cas de demande de la famille.


Bibliographie

Bradley WG et al., Neurology in clinical practice, 5th ed., Butterworth-Heinemann, e-dition, 2007

EMC, Neurologie, Elsevier, 2018